Ah merci les filles, vraiment ! Vive l’égalité… Depuis qu’on a le droit de travailler comme les mecs, – enfin en théorie, mais ce n’est pas ici le sujet –, elles sont belles, nos journées… Moi, je vous le dis en toute franchise : il y en a marre de jouer les superwomen !
Qui a dit que les femmes étaient le sexe faible ? Celui-là devait tout ignorer du spécimen particulièrement endurant et hautement polyvalent que sont les femmes. Il n’y a qu’à voir de quelle manière les conjointes et les mères assurent aujourd’hui ce qu’on appelle “la double journée” qui, entre travail domestique et travail professionnel, les astreint à une activité intense laissant peu de répit. Certes, ces messieurs mettent de plus en plus la main à la pâte, mais, les études le montrent, le chemin reste long pour arriver à une répartition équilibrée des tâches ménagères et davantage encore en ce qui concerne l’éducation des enfants.
Tout en s’échinant à essayer de concilier temps familial et professionnel, les femmes aspirent aujourd’hui légitimement à l’épanouissement personnel et à des moments de temps libre. Visée oh combien laborieuse, quand le plus souvent nous sommes tiraillées entre nos différents rôles, si nous ne passons pas nos journées à éprouver de la culpabilité… En effet, comment ne pas se sentir un parent indigne lorsque l’on dépose son marmot à la crèche avec de la fièvre parce qu’on a épuisé les quatre jours de congés annuels octroyés pour ces circonstances ? Comment ne pas avoir l’impression d’être un collègue indisponible lorsque l’on doit quitter chaque jour le bureau à dix-sept heures précises même lorsque la réunion en cours est importante ?
Entre les heures de travail et la présence attendue, sinon obligée, à la maison, les moments pour flâner, se ressourcer, souffler, se délasser,… sont du registre de l’exceptionnel. Comme il est tout aussi souvent malaisé de trouver une place dans son emploi du temps pour un engagement militant quelconque. Et là encore, comment, pour celles qui font ce choix, ne pas se sentir coupables de consacrer une partie de leur temps, déjà rare, à lutter pour un monde meilleur au détriment de l’éducation de leurs enfants ?
Mais évitons d’emblée toute méprise, ceci n’est pas un plaidoyer destiné à renvoyer les femmes au foyer, ni à culpabiliser les hommes au sein desquels, notamment parmi ceux qui assurent une garde alternée, ces doléances sont aussi de plus en plus formulées. L’intention de ce petit coup de gueule est d’attirer l’attention de tous, et des responsables politiques en particulier, sur le fait que la société gagnerait à reconnaître le rôle spécifique et l’apport de celles – et de ceux ! – qui souhaitent s’occuper de leurs enfants, cette reconnaissance impliquant a fortiori une politique proactive pour leur donner les moyens d’assumer pleinement ce choix.
Ainsi, les cabinets de pédo-psy bondés de gosses que les parents n’ont plus le temps d’écouter désempliraient-ils peut-être… Les arrêts-maladie pour raison de surmenage seraient sans doute moins courants… Les enfants nourris au sein maternel seraient moins sujets aux allergies et aux maladies… Et la liste est longue des avantages – et économies, puisque c’est toujours le nerf de la guerre ! – que pourrait retirer la société à mieux reconnaître le rôle parental et à permettre une articulation plus harmonieuse de celui-ci avec les autres domaines de la vie. Mais au regard de la tendance actuelle à vouloir criminaliser les parents en difficulté, il est fort à craindre que le chemin de cette reconnaissance sera encore semé d’embûches.