La laïcité fonde le régime des libertés et des droits humains sur l’impartialité du pouvoir civil démocratique dégagé de toute ingérence religieuse. Bruxelles Laïque considère depuis longtemps que les religions sont loin d’être les seuls groupes d’intérêts privés pouvant inféoder le pouvoir civil ou ébranler son impartialité. Considérant que le néo-libéralisme s’impose comme un dogme, avec ses prophètes que sont les économistes et les bonzes de la finance, avec la foi de ses adeptes en les forces “invisibles” du marché et ses lobbys politiques qui cherchent à influencer non seulement nos décideurs, mais également notre conception de l’État et du bien commun, il nous semblait essentiel de mobiliser la méthode libre-exaministe afin de déconstruire ce système de croyances.
L’émancipation des personnes face aux croyances intéressées passe avant tout par une réelle liberté de conscience, elle-même dépendante de la qualité de l’éducation que nous recevons et des médias qui nous informent. L’impartialité qui doit caractériser ces institutions démocratiques fondamentales ne peut faire l’objet d’aucun compromis. Or, s’il y a bien une chose que nous retenons de l’édition 2018 du Festival des Libertés c’est la crainte des citoyennes et citoyens face à des pouvoirs de plus en plus totalitaires et totalisants, c’est-à-dire de plus en plus à même de produire et d’anticiper nos préférences, qu’il s’agisse de politique comme de mode. Le pouvoir totalisant du privé agit bien au-delà des institutions ayant pour mission d’œuvrer au bien commun. Il nous confronte tous jusque dans notre conscience, dans notre intimité.
Dans ce numéro, il s’agit de s’intéresser aux lobbys qui agitent notre capitale et au contexte idéologique et sémantique qui les accompagne, en se demandant quels liens existent entre ceux-ci. Dans l’esprit humaniste qui caractérise notre alma mater, nous cherchons ici à interroger les modes d’ingérence du privé dans le public sans a priori ni orientations politiques. Que ce soit dans les universités, l’espace public, les politiques publiques, le travail social, l’ingérence et l’influence du privé modifient les pratiques institutionnelles et cherchent à faire passer par pertes et profits l’intérêt général et les principes démocratiques, ainsi qu’à reléguer le rationalisme et les faits à des opinions. Il est de notre devoir de laïques de résister à l’intimidation et à la manipulation en réaffirmant nos principes et nos valeurs ce numéro de Bruxelles Laïque Échos.
Loin de chercher à faire dans le procès d’intention ou de donner dans le prêt-à-penser, les articles composant ce dossier permettront aux lectrices et aux lecteurs d’interroger leur propre rapport à la frontière entre les domaines privé et public. Nous espérons sincèrement que notre démarche laïque, pourra contribuer à susciter des discussions et à éveiller la curiosité des uns et des autres par rapport à la menace constante qui pèse sur l’impartialité des pouvoirs civils.