« Si jamais vérité morale fut démontrée, il me semble que c’est l’utilité générale & particulière de ce Projet. Les avantages qui résulteroient de son exécution & pour chaque Prince & pour chaque Peuple & pour toute l’Europe, sont immenses, clairs, incontestables […] tant chacun trouveroit par l’expérience son profit particulier dans le bien commun ».
Jean-Jacques Rousseau, Projet de Paix Perpétuelle, 1761.[1]
INTRODUCTION
L’Union européenne (UE) fait l’objet de beaucoup de fantasmes, autant chez ses défenseurs, que chez ses détracteurs, ou encore chez celles et ceux qui la regardent de l’extérieur. Ce n’est pas d’hier qu’une Europe unifiée fait rêver, que ce soit chez des Princes et des empires qui ont voulu la conquérir, chez des penseurs de l’art politique, elle a toujours été l’objet de fantasmes multiples. Utopie salvatrice pour les uns, utopique et dangereuse pour les autres, d’aucuns qui sont préoccupés par des enjeux, politiques, économiques ou sociaux ne se privent d’exprimer des opinions diverses, souvent tranchées, sur l’UE et son destin.
Cette analyse propose de s’intéresser à l’UE, afin de comprendre ce qu’il en est vraiment et de faire le point suite aux récentes élections. Pour ce faire, nous allons débuter par un court détour historique, pour s’intéresser aux Idées des Lumières, sur ce qu’on appelait à l’époque, le Projet de Paix perpétuelle. Nous allons ensuite nous tourner vers la naissance de l’UE telle que nous la connaissons aujourd’hui, pour en rappeler les bases rationnelles, ancrées dans une raison instrumentale, suite la Seconde guerre (1939-1945), ainsi qu’à ces phases d’expansion successives, toujours liées à des questions de défense. Finalement, nous allons tenter de synthétiser, à partir des résultats des dernières élections, quelles pistes d’avenir s’offrent aujourd’hui à l’UE, sans faire l’économie des dangers qui la guettent et qui mettent en péril la sécurité et, donc, également les droits et libertés des individus qui la composent.
SUR LES RUINES DE L’EMPIRE ROMAIN…
Suite à la chute de l’Empire Romain, les diverses principautés d’Europe, le Vatican ou encore l’Empire Ottoman ont tous cherché à reproduire la grandeur de Rome en voulant conquérir le Continent et imposer leurs croyances, leurs mœurs et établir leur imperium économique et militaire. Cet état de guerre permanent est d’ailleurs ce qui a inspiré, de l’autre côté de l’Atlantique, les Pères Fondateurs américains à unir les colonies, afin d’éviter les erreurs du passé, truffé d’exemples tirés de l’Antiquité et de l’ascension de Rome. Le danger étant que les diverses colonies ne s’allient avec différentes puissances européennes et que les guerres du Vieux Continent ne se transposent dans le Nouveau Monde.
Chez les Lumières, l’idée de La paix perpétuelle en Europe était un sujet de la plus grande importance. D’abord rédigé par l’Abbé Saint-Pierre, puis commenté par Rousseau, avant que Kant en publie aussi sa version, La paix perpétuelle était vue comme une utopie qui serait dans l’intérêt de tous en permettant la stabilité et la prospérité des peuples d’Europe. Kant avait déjà posé le problème avec la « proposition 7 » dans Idée d’une histoire universelle du point de vue cosmopolitique : « Le problème de l’établissement d’une société civile parfaite est dépendant de celui de l’établissement de relations extérieures entre les États régies par des lois, et ne peut être résolu sans que ce dernier ne le soit ».
Le problème des relations internationales est donc plus d’actualité que jamais. L’UE doit se positionner. La guerre est à nos portes et le pouvoir d’achat de nos concitoyennes et concitoyens est un enjeux immédiat. Qu’est-ce que l’UE, dans sa construction opaque, peut pour les salariés et les laissés-pour-compte… Puisque l’on sait que les très riches s’en sortent bien et les inégalités se creusent. Est-ce que l’Europe peut aider, ou au contraire, nuit-elle à l’émancipation des personnes et à l’exercice des droits fondamentaux ?
NAISSANCE ET EXPANSION DE L’UNION EUROPÉENNE (ET DE L’OTAN)
Suite à la Seconde guerre, les dirigeants européens en sont venus à la conclusion que le développement de l’armement était tellement avancé qu’il n’était plus possible de concevoir des vainqueurs, au sens classique du terme, à l’issue des guerres, comme cela avait toujours été le cas dans l’histoire. Il y eu évidemment des vainqueurs et des vaincusdans cette guerre, qui a donné naissance à la Guerre froide. La création du bloc soviétique, notamment avec la Tchécoslovaquie de l’époque, créait également un incitatif supplémentaire pour les pays d’Europe occidentale à s’unir. Il ne s’agit pas de faire fi de cela, mais plutôt de mettre en avant le raisonnement qui a poussé les nations européennes à imbriquer leurs intérêts, afin d’éviter à nouveau la guerre, dont les coûts matériels et humains étaient devenus insupportables pour les États-Nations. Les pays étaient tous tellement dévastés, qu’on était obligé de constater que le retour sur l’investissement dans le jeu des guerres et de l’armement n’en valait pas la chandelle. Il fallait donc trouver une manière de lier les intérêts économiques des pays, afin de rendre tangible le coût prohibitif de la guerre et, ainsi, créer une structure d’incitatifs qui conduit vers la coopération, plutôt que vers le conflit.
À sa naissance, en 1951, la Communauté européenne du charbon et de l’acier était composée de six pays : la France, l’Allemagne, l’Italie et le Benelux, c’est-à-dire la Belgique, les Pays-Bas et le Luxembourg. Parmi ses principaux architectes, nous retrouvons Jean Monnet et Robert Schuman.[2] Puis, en 1957, le traité de Rome établit la Communauté économique européenne (CEE).
« La première session de l’Assemblée parlementaire européenne, précurseur du Parlement européen d’aujourd’hui, se tient à Strasbourg (France) et Robert Schuman en devient le président. Elle remplace l’Assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l’acier et prend le nom de Parlement européen le 30 mars 1962 ».[3]
Ensuite, s’en suivit plusieurs phases d’élargissement, entre 1973 et 2007, 21 nouveaux pays vont se joindre à l’UE, créant ainsi un bloc politique bien établi… sur papier. Mais, dans les faits, l’Europe demeure un point faible au niveau de la sécurité. Elle tire sa puissance du fait de la valeur de sa monnaie, l’Euro, mais la volonté des puissances étrangères de réduire leurs dépendances et leurs contributions à la valeur du Dollar américain et de l’Euro devient un problème… mais restons sur la chronologie.
La prospérité économique et la situation géopolique incitent plusieurs pays à se joindre à l’UE. Elle devient une force économique grâce à la création de l’Euro et à sa valeur, ainsi qu’à la crédibilité politique du Parlement européen, qui tire de plus en plus de légitimité, du fait de l’accroissement de ses membres. Aujourd’hui, l’UE c’est 27 pays, qui se consultent pour décider du sort de plus d’environ 400 000 000 de personnes.
Face à ce défi titanesque, plusieurs coalitions s’organisent. Et cela ne date pas d’hier. À la suite de la chute du Mur de Berlin, les collaborations entre une Europe de plus en plus organisée, du moins au niveau administratif et fiscal, et l’OTAN, ont connu une phase d’accélération, suite aux nombreuses demandes d’adhésion, notamment face au retour de la menace d’un nouvel impérialisme russe. Nous le voyons tragiquement aujourd’hui. L’Europe risque de devenir, à nouveau, un champ de bataille… où les puissances s’affrontent. Il est donc impératif pour l’Europe de mettre en place des moyens de défense, afin de pouvoir rivaliser avec les autres grandes puissances, ne serait-ce que sur le plan diplomatique.
Pour le moment, les puissances étrangères, notamment la Russie, exploitent les faiblesses sécuritaires et commerciales de l’Europe. Mais il s’agit là aussi d’une occasion pour l’UE de se fortifier. Évidemment que la montée des partis d’extrême-droite est néfaste, autant pour les libertés à l’intérieur, que pour la puissance extérieure de l’Europe, mais il ne faut pas désespérer. Il existe toujours une voie pour que l’UE soit une force de pacification et de prospérité. C’est d’ailleurs à nous, en tant que laïques, de nous battre pour notre projet de société, devant le conservatisme qui phagocyte nos démocraties.
Mais alors où réside l’espoir, l’utopie réaliste ? Dans la laïcité ! Dans l’établissement de gouvernements traitant toutes et tous de manière égale. Dans l’abolissement des frontières pour celles et ceux pour qui l’accès aux droits est compliqué et, aussi, simplement, dans un monde plus humain. L’Europe doit incarner les valeurs qu’elle défend, en termes de droit du logement, de droit à l’éducation et à la santé.
Nous sommes tous sur la ligne de front, tous les jours. L’accès aux droits fondamentaux demeure un combat, au-delà des attributs sociologiques de chacune et chacun. La limitation des droits prônée par l’extrême droite est hostile au projet européen. Évidemment il ne s’agit de croire qu’il n’y a qu’une seule Europe possible… Nous sommes actuellement devant, ce qu’l’on appelle en philosophie, un faux dilemme. Entre une Europe superpuissante et une Europe trop faible pour affronter les défis auxquels nous sommes toutes et tous confrontés. Or, il existe une voix pacifique.
Nos dirigeants nous éloignent souvent de la voie que nous souhaitons, nous comme peuple, voir prendre forme. La laïcité a d’ailleurs un grand rôle à jouer dans ce rassemblement populaire, malgré sa mauvaise presse et l’hostilité ambiante envers elle. Au contraire, la laïcité est un principe rassembleur, permettant à celles et ceux, de bonne volonté, de pouvoir exprimer une position ouverte, démocrate et pluraliste. Ce dont nous avons le plus besoin en ce moment. La Belgique doit se recentrer sur ses valeurs, c’est-à-dire la social-démocratie et son modèle unique… et laisser aux associations une place importante pour tisser un lien social constructif et créer du lien humain permettant de créer une vraie richesse sociale et humaine.
Mais que pèse la Belgique dans une Europe soumise aux pressions du FMI, de l’UE et de l’OTAN ? Le contrôle démocratique du budget doit être un enjeu, mais qu’en est-il réellement ? Quelle est notre place dans l’échiquier politique et comment pouvons-nous influencer les politiques, autant à l’interne qu’à l’externe, dans le contexte qui est le nôtre ? La Belgique demeure un pays avec un protection sociale des plus enviables. Mais cela est menacé. Il y a lieu de s’inquiéter sur l’avenir des politiques européennes, américaines, mais aussi belges et locales.
L’élargissement de l’UE et de L’OTAN à l’Ukraine fait aujourd’hui l’objet de nombreux débats politiques, pour lesquels nous ne souhaitons pas prendre position, mais cela interroge tout de même la construction de l’UE et son rôle de défense dans l’équilibre global.
La menace russe a mené, dans l’histoire, à des formes d’alliances, comme la fédération entre la Pologne et la Lituanie en 1569 (premières élections libres en Europe). L’histoire semble se répéter… L’Ukraine étant un point de tension et de rupture entre la Russie et l’Europe. Le désir des Nations européennes de se prémunir contre l’impérialisme russe demeure un moteur de la politique internationale.
Le point de rupture vient, comme tout le monde le sait désormais, des accords de Minsk. Les accords de Minsk, capitale de la Biélorussie, devaient sceller l’issue de la Guerre Froide, ou du moins en termes de sécurité et d’expansion de l’OTAN, entre l’Occident et la Russie, aspirant alors, au statut de superpuissance géopolitique. Son rapprochement avec la Chine, depuis lors, n’est pas à négliger non plus – la Chine achète beaucoup de matières premières et de gaz à la Russie, finançant ainsi, par proxy (?), la guerre contre l’OTAN.
Depuis des décennies, l’expansion de l’UE jumelée à une expansion de l’OTAN, suscite la hantise de Poutine et de l’État russe. 2004 marque un tournant. L’entrée de dix nouveaux pays membres, essentiellement du Centre et de l’est de l’Europe, dont plusieurs ont des frontières directes avec la Russie, change la donne. Alors que Poutine avait été le premier dirigeant à rencontrer Bush après les attentats du 11 septembre 2001, afin de saisir une occasion unique d’enterrer la hache de guerre, les États-Unis et l’OTAN ont plutôt décidé de faire fi de l’offre de la Russie de revoir sa composition et sa relation avec le pays de Poutine.
Il ne s’agit pas de prendre position, mais simplement d’expliquer l’évolution des relations internationales, afin de comprendre, un peu mieux, la situation dans laquelle nous sommes aujourd’hui. C’est justement suite à ces événements que l’adhésion de dix nouveaux pays à l’UE en 2004 représente un changement majeur dans l’échiquier géopolitique international. Notamment avec l’entrée de pays de l’ex Union Soviétique, comme les pays baltes, mais aussi la Tchéquie, la Pologne, la Slovaquie, la Slovénie et la Hongrie, ainsi quChypre et Malte complètent. Les candidatures de la Bulgarie et de la Roumanie aboutissent ensuite en 2007 – et également de la Turquie, sempiternel débat, toujours brûlant d’actualité.
S’en suivit la crise économique qui a secoué d’abord les États-Unis, mais beaucoup plus longuement ensuite l’UE. Puis vint la vague d’attentats terroristes en Europe, ce qui a à la fois nécessité et justifié une intensification des activités de l’OTAN en Europe et de sa collaboration avec l’UE. Ce que la Russie a évidemment très mal pris, sans compter la guerre latente en Ukraine qui remonte à 2014, avant l’escalade de 2022 avec « l’opération militaire spéciale » menée par Moscou. L’UE se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins, entre financiarisation et sentiments d’abandon des classes populaires d’un côté et, de l’autre, des périls sécuritaires et géopolitiques sans précédent dans son histoire.
QUEL AVENIR ?
Au lendemain des élections européennes, nous ne pouvons que constater une montée de la droite et de l’extrême droite, c’est-à-dire d’un conservatisme nationaliste, hostile à l’Europe. Parallèlement à cela, deux éléments dans les relations internationales pèsent sur l’Europe. D’un côté, la guerre en Ukraine divise les gouvernements européens, avec Emmanuel Macron en représentant de l’Union européenne (notamment, car la France est le seul pays à détenir un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU) … alors que sa légitimité est fortement remise en question par les élections législatives qui ont cours au moment de mettre ces lignes sous presse – qui montre d’ailleurs les limites de la Constitution de la Ve République… et leur instrumentalisation – possible – par le pouvoir exécutif. De l’autre côté, les élections américaines à venir risquent, selon les sondages actuels, d’annoncer un changement important de direction dans la politique extérieure des États-Unis et, donc, de l’OTAN. En d’autres mots, alors que l’UE en est à un moment charnière de son histoire, que l’Europe devrait être plus soudée que jamais, elle semble se fracturer sur la base d’un désir de retour en arrière et de défiance à l’égard des institutions européennes ; en plus d’être très faible du point de vue de la défense. Autant du coté européaniste que du côté nationaliste, la position géopolitique de l’UE demeure faible dans l’échiquier mondial, alors que la Russie et la Chine sont en train de faire basculer l’équilibre international, avec des alliés comme la Corée du Nord et l’Iran, qui dirige par ailleurs dans l’ombre des groupes comme le Hezbollah, le Hamas, les soutiens d’Al Assad en Syrie et les rebelles au Yémen… Comment les élections américaines affecteront les relations internationales et comment se positionnera l’Europe dans ce contexte explosif ?
La Belgique pèse peu dans ce jeu dangereux. Nous avons tout intérêt à une Europe très forte. Ne pas seulement être le siège de certaines institutions, mais que celles-ci pèsent sur le cours du monde. Ne pas seulement être une cible, mais un point de ralliement. Cela demande de l’ouverture, des politiques nouvelles, dont le mouvement laïque se réclame ouvertement. Une Europe plus humaine, plus ouverte, plus coopérative, plus juste et moins réactionnaire !
CONCLUSION
L’UE est donc à un moment charnière de son histoire et le rôle de l’utopie européenne est plus que jamais à remettre en question. Alliance économique ou militaire ? Hostile ou alliée de la Russie ? Centre mou de l’OTAN ? Quelle place l’UE occupe-t-elle aujourd’hui dans l’échiquier de la géopolitique internationale ? Il faut se positionner. En l’état, ce n’est pas évident. Ce qui est inquiétant pour nos droits et libertés. Comme nous avons cité des auteurs des Lumières d’entrée de jeu, l’Histoire avec un grand H se répète… L’Europe doit faire un choix… mais elle semble se diriger dans le piège des puissances extérieures qui veulent la diviser, surtout en tissant des liens nébuleux avec les partis et mouvements d’extrême droite.
Actuellement, l’UE et la droitisation de ses états membres sont plus que préoccupantes. On a parfois l’impression que « plus ça change, plus c’est pareil ». Citons, en longueur, le réalisme de Rousseau (Paix perpétuelle) pour conclure : « Toute l’occupation des Rois, ou de ceux qu’ils chargent de leurs fonctions, se rapporte à deux seuls objets, étendre leur domination au-dehors & la rendre plus absolue au-dedans ; toute autre vue, ou se rapporte à l’une de ces deux, ou ne leur sert que de prétexte ; telles sont celles du bien public, du bonheur des sujets, de la gloire de la nation, mots à jamais proscrits du cabinet & si lourdement employés dans les édite publics, qu’ils l’annoncent jamais que des ordres funestes, & que le peuple gémit d’avance quand ses maîtres lui parlent de leurs soins paternels […]
Il est facile encore de comprendre que d’un côté la guerre et les conquêtes, & de l’autre le progrès du despotisme s’entr’aident mutuellement ; qu’on prend à discrétion dans un peuple d’esclaves, de l’argent & des hommes pour en subjuguer d’autres ; que réciproquement la guerre fournit un prétexte aux exactions pécuniaires, & un autre non moins spécieux d’avoir toujours de grandes armées pour le tenir le peuple en respect ».
À nous laïques de veiller sur nos libertés démocratiques et sur le respect de nos droits fondamentaux… car nous ne sommes pas à l’abri de manifestations nouvelles de ce que nos ancêtres ont subi, à divers moments, sous diverses formes. Restons donc bien sur nos positions, afin que l’Europe soit un objet d’émancipation et non de guerre et de restriction des libertés. Entre utopie, réalisme et dérives, l’Europe a plus que jamais besoin des lumières de l’humanisme pour tenir ses promesses d’émancipation.
[1] Tiré de la version original, en orthographe de l’époque.
[2] https://european-union.europa.eu/principles-countries-history/history-eu/eu-pioneers_fr
[3] https://european-union.europa.eu/principles-countries-history/history-eu/1945-59_fr